Les fraisiers sont au cœur de nombreux jardins, et voir s’épanouir leurs fruits rouges, promesses de gourmandise, fait le bonheur des jardiniers de tous âges. Pourtant, pour cultiver des fraises saines et abondantes, un véritable défi s’impose : la lutte contre un cortège de maladies et de ravageurs aussi tenaces qu’ingénieux. Au fil des années en accompagnant des groupes de jardiniers lors d’ateliers pratiques, on découvre mille anecdotes, comme cette mamie qui me confiait employer la cendre de cheminée sur le paillage pour protéger ses plants, ou le voisin adepte du bicarbonate de soude en pulvérisation contre un champignon coriace. Dans le potager familial, l’observation des premières taches suspectes sur les feuilles débute souvent par la stupéfaction, puis vient la riposte, avant que le plaisir du jardinage ne revienne. Mieux vaut alors connaître les principaux signes, reconnaître les failles des conditions de culture, et surtout adopter, à temps, les gestes de prévention adéquats. Ce guide accompagne chacun, amateur éclairé ou débutant, dans le labyrinthe des maladies des fraisiers, pour sauvegarder son coin de jardin gourmand et garantir des récoltes joliment parfumées.
Comprendre les maladies des fraisiers : enjeux et vigilance au jardin
Maîtriser les maladies du fraisier n’est pas qu’une affaire d’expert ; il s’agit avant tout d’observation et d’anticipation pour chaque cultivateur amateur. Dès l’implantation, les plantes de fraises sont exposées à une multitude de menaces : champignons, bactéries, virus mais aussi un cortège de ravageurs parfois discrets mais redoutables. On peut considérer que les trois-quarts des problèmes viennent d’un déséquilibre du sol ou de conditions humides et stagnantes.
Les enjeux sont doubles : préserver la vitalité des feuilles (véritables « usines » à énergie) pour assurer une bonne fructification, et éviter la propagation des agents pathogènes qui, non traités, contaminent l’ensemble de la culture. On l’a constaté maintes fois : une infection négligée un printemps provoque un effondrement de la récolte l’été suivant, sans parler d’une contagion possible à d’autres plantes du jardin (framboisiers, tomates…).
La vigilance repose sur une routine toute simple mais rigoureuse : surveiller la moindre anomalie sur les feuilles, repérer les taches, observer la base du fraisier et la surface du sol après l’arrosage. Les résultats sont là : des fraisiers sains, robustes et rarement sujets au dessèchement ou à la pourriture du collet. Garder ce cap suppose de maîtriser la palette des maladies cryptogamiques, bactériennes ou virales… ainsi que les gestes quotidiens de prévention, une notion qui fait toute la différence au potager.

Les maladies cryptogamiques du fraisier
Les champignons, responsables d’une majorité de maladies sur le fraisier, guettent particulièrement lorsque l’humidité persiste. Les plus fréquents sont l’oïdium, la pourriture grise (botrytis) et l’anthracnose. Ces pathologies partagent un point commun : elles prolifèrent comme une trainée de poudre en conditions chaudes et humides, surtout lorsque le feuillage reste dense et le sol mal aéré.
L’oïdium
Ce champignon visible par un duvet blanc sur les feuilles et parfois sur les fruits étouffe la plante. Les symptômes sont limpides : enroulement, aspect farineux, ralentissement de la croissance, parfois déformation des fraises. Un arrosage excessif ou des nuits fraîches favorisent son installation. Il s’attaque d’autant plus vite quand les variétés sont sensibles ou le feuillage reste mouillé.
La conséquence : des fruits moins savoureux et souvent impropres à la consommation. Pour agir, on pulvérise un traitement préventif à base de lait écrémé dilué, ou du bicarbonate de soude (une cuillère rase par litre d’eau). En dernier recours, les fongicides homologués peuvent aider, mais il ne faut jamais l’oublier : l’aération et le paillage des fraisiers sont de vrais alliés pour prévenir cette maladie.
La pourriture grise ou botrytis (Botrytis cinerea)
Le botrytis est la terreur des périodes pluvieuses. Reconnaissable à un feutrage gris-vert sur les fruits et le piquage brunissant des feuilles, il entraîne en quelques jours la momification des fraises, condamnées avant maturité. Les symptômes s’aggravent dans les carrés de fraisiers mal espacés ou si les paillages restent gorgés d’eau.
Là encore, récolter tôt les fruits mûrs, aérer les rangs et supprimer les résidus végétaux au sol est capital. Une pulvérisation de décoction d’ail ou de la fameuse bouillie bordelaise est possible en prévention ou lors d’une attaque. En cas de pluie prolongée, il vaut mieux privilégier des variétés résistantes comme Albion.
L’anthracnose (Colletotrichum fragariae)
Moins connue mais redoutée depuis quelques années, l’anthracnose attaque feuillage, tiges et fruits. Des taches nécrotiques brunes, s’agrandissant rapidement, précèdent la pourriture des fraises. Les périodes de fortes chaleurs après un orage favorisent sa diffusion, d’autant plus si le sol reste humide en surface.
Le nettoyage systématique des plants après la récolte, et la destruction des fruits atteints, constituent le premier rempart. Un traitement à la décoction de prêle ou un fongicide spécifique peut s’imposer, avec précaution. En prévention, on privilégie un espacement généreux des pieds et un paillage léger.
Maladie | Symptômes | Conditions favorables | Conséquences | Prévention et Soins |
---|---|---|---|---|
Oïdium | Duvet blanc, feuilles enroulées, déformation fruits | Humidité, peu de soleil, feuilles mouillées | Faible maturation, baisse de rendement | Aération, pulvérisation lait/bicarbonate, éventuellement fongicides |
Botrytis/pourriture grise | Feutrage gris, fruits pourris, taches brunes sur feuilles | Pluie, sol mal drainé, densité élevée | Perte de fruits, fructification compromise | Nettoyage, décoction d’ail/bouillie bordelaise |
Antracnose | Taches nécrotiques, dessèchement tiges/fruits | Chaleur après pluie, sol humide | Perte partielle ou totale de la récolte | Destruction fruits atteints, décoction prêle, espacement |
Maladies bactériennes : symptômes et solutions pour les fraisiers
Les bactéries provoquent chez les fraisiers diverses altérations, souvent sournoises, car moins visibles que les champignons. On rencontre régulièrement la brûlure bactérienne et le flétrissement bactérien, surtout lorsque l’arrosage est anarchique ou lors d’épisodes orageux suivis d’un fort ensoleillement.
Brûlure bactérienne (Xanthomonas fragariae)
On observe sur les feuilles de petites taches translucides, souvent cernées de brun, qui finissent par fusionner et provoquer un dessèchement général. Ces symptômes ressemblent parfois à une attaque de champignon, mais la progression est plus rapide après une blessure du feuillage.
L’humidification excessive lors de l’arrosage, le sol mal drainé ou des outils souillés en sont les principales causes. La conséquence directe est une perte de vigueur, parfois du fraisier entier. On privilégie alors la coupe et la destruction des parties atteintes. Le traitement se limite au cuivre homologué (bouillie bordelaise) en strict respect des doses, associé à un séchage complet du feuillage après l’arrosage.
Flétrissement bactérien (Phytoplasme ou bactéries diverses)
Des plantes jaunissant, ramollissement des tiges, dessèchement ponctuel, symptômes évoquant la verticilliose, peuvent signaler ce fléau. Les pieds touchés présentent une faible floraison, des fraises petites et souvent déformées. Le sol asphyxié, ou le manque de rotation des cultures, favorisent ce phénomène.
La destruction des plants malades est le meilleur choix : aucun pesticide n’est réellement efficace une fois la maladie installée. La prévention repose sur la rotation des cultures, l’achat de plants certifiés sains et la désinfection des outils.
Au fil des saisons, on constate que l’adoption de ces gestes de bon sens limite grandement la propagation des maladies bactériennes. L’observation régulière sauve souvent toute une planche de fraisiers.
Maladies virales affectant les fraisiers
Les viroses frappant les fraisiers se traduisent par un déclin lent mais inéluctable. Ces maladies sont transmises par des insectes suceurs de sève (pucerons, thrips) ou parfois par des outils contaminés. On reconnaît la mosaïque du fraisier, la jaunisse et la maladie du rabougrissement.
Les symptômes : mosaïque de couleurs sur les feuilles, décoloration, chevrons ou dessins bizarres, croissance ralentie, fruits chétifs. Le sol pauvre, les plants trop serrés, la promiscuité avec des plantes malades aggravent encore la situation.
La récolte devient alors anecdotique, la vigueur du fraisier disparaît au fil des semaines. L’arrachage des plants atteints reste la seule issue, car aucun traitement n’existe à ce jour pour les maladies virales. Adopter des plants sains, surveiller les populations de pucerons et désinfecter fréquemment les outils sont les seules protections réellement robustes.
Ce que l’on recherche aujourd’hui : la mise en place de barrières naturelles, de filets et l’usage d’auxiliaires pour limiter les insectes vecteurs, une pratique qui commence à porter ses fruits dans les jardins écologiques.
Ravageurs favorisant les maladies des fraisiers et gestes de prévention écologique
Impossible de parler de maladies des fraisiers sans évoquer leur cortège de ravageurs : punaise, acariens, nématodes, pucerons, otiorhynques, oiseaux, limaces. Chacun d’eux fragilise la plante, ouvrant des portes d’entrée aux champignons et bactéries.
Si l’on prend l’exemple des acariens, les feuilles s’enroulent et se décolorent, précipitant l’arrivée d’oïdium. Les pucerons installent le virus de la mosaïque en quelques jours seulement. Les limaces, quant à elles, percent les fruits et accélèrent la pourriture grise. On note aussi l’action des oiseaux, friands de fraises mûres laissant derrière eux blessures et entrée possible de maladies.
La lutte naturelle s’impose, souvent très efficace : installation de coccinelles ou chrysopes pour dévorer les pucerons, paillis à base de fougère pour repousser limaces, pièges à bière. Pour les oiseaux, un filet léger et souple protège sans gêner la pollinisation. Des rotations de culture et un sol toujours bien drainé renforcent la résistance des plants. Astuce d’initié : installer dès le printemps des coupelles de coquilles d’œufs broyées limite le déplacement des limaces autour du fraisier. Pour les nématodes, planter du souci ou du tagète entre les fraisiers offre une protection appréciée par de plus en plus de jardiniers.
Maladies secondaires des fraisiers : tache foliaire, brûlures, pourriture et autres
Parmi les « petites » maladies qui font leur nid dans le jardin, on retrouve Mycosphaerella fragariae, Diplocarpon earliana, ou la pourriture sèche du collet (Phomopsis obscurans). Ces affections évoluent souvent lentement, mais deviennent un véritable casse-tête lorsqu’on néglige l’entretien.
La tache foliaire due à Mycosphaerella fragariae provoque de nombreuses taches rondes et foncées sur le feuillage; en cas d’humidité persistante, les feuilles jaunissent et tombent prématurément, limitant la photosynthèse. Les brûlures du bord des feuilles sont plutôt signe d’un stress hydrique ou minéral mais ouvrent la porte à des champignons opportunistes.
La pourriture sèche ou du collet est traître, car elle attaque d’abord la base du fraisier (jusqu’à l’apparition de pourriture blanche, puis, le dessèchement des feuilles). Quant à la verticilliose (due à Verticillium dahliae), elle entraîne un flétrissement brutal ; le feuillage se recourbe, les plants cessent de croître et il faut bien souvent arracher et détruire les sujets atteints.
Sur toutes ces maladies, le meilleur réflexe reste la coupe et l’élimination au compost (hors tige ou collet totalement pourris) pour les feuilles atteintes, le surfaçage du sol et un arrosage modéré. Les produits chimiques n’offrent aucune efficacité probante sur la durée : la clé, c’est vraiment l’observation et une hygiène stricte du carré potager, avec suppression immédiate des symptômes suspects.
Prévenir les maladies des fraisiers : rotation, hygiène et bonnes pratiques culturales
La prévention s’impose comme la stratégie la plus durable et accessible à tous. Penser la culture des fraisiers sur le long terme passe par la rotation, l’aération des plants, la propreté du sol et la sélection de plants sains. Les rotations pluriannuelles (quatre ans minimum avant de replanter au même endroit) brisent le cycle des champignons et nématodes, véritables « dormeurs » du jardin.
Nettoyer régulièrement les outils à l’eau savonneuse puis sécher soigneusement doit devenir un réflexe. Un paillage végétal bien réparti protège du choc des éclaboussures (source de dissémination de champignons). L’association avec des plantes aromatiques (ail, oignon, tagète) limite certains agents pathogènes. Certains carrés potagers surélevés ou buttes drainantes font la différence dans les petits jardins urbains, réduisant sensiblement la fréquence des maladies fongiques.
L’espacement généreux entre chaque fraisier, le suivi d’un arrosage ciblé et jamais excessif, une fertilisation modérée (pas d’azote à gogo !), guident vers un écosystème plus robuste où chaque attaque reste localisée et maîtrisée. Les meilleurs jardiniers vous le diront : combiner la diversité végétale, la patience et une discipline d’habitat sain est la plus belle assurance-vie de la récolte.
Conseils d’observation, détection précoce et astuces de jardiniers pour un fraisier sain
Savoir regarder autrement son carré de fraises est un art. L’observation attentive fait toute la différence : relever des taches suspectes, un léger flétrissement ou une couleur anormale du feuillage permet d’anticiper un problème et d’agir vite, avant qu’il ne s’étende.
Un rituel hebdomadaire suffit : passer la main sous les feuilles, observer le revers, sentir l’odeur du sol (une odeur aigrelette signale le début de la pourriture), toucher les fruits pour déceler un début de ramollissement. Les jardiniers de métier sont de plus en plus nombreux à noter leurs observations sur un petit carnet ou dans une appli, pour repérer l’apparition cyclique des maladies.
Parmi les astuces éprouvées : toujours récolter les fraises le matin, avant la rosée, pour éviter de contaminer les fruits sains avec des spores présentes sur les feuilles. Arroser au pied, sans mouiller le feuillage. Installer des tuteurs pour soutenir les rangs, réduire le contact sol-fruit. On peut considérer que ces petites habitudes, faciles à adopter, font gagner une saison entière de sérénité.
Indicateur d’alerte | Action recommandée |
---|---|
Taches brunes sur feuilles | Découper la feuille, surveillance attentive des plants voisins |
Fruits déformés/ramollis | Récolter sans délai, nettoyer le sol environnant |
Duvet gris sur fruits ou feuilles | Retirer et éliminer, ventiler le carré de fraisiers |
Enroulement ou jaunissement subit | Chercher la présence de ravageurs, traiter au savon noir ou décoction naturelle |
Feuilles tachetées | Couper systématiquement, surveiller l’évolution sur une semaine |
Utilisation raisonnée des traitements et respect de l’environnement
Le dernier rempart, c’est le traitement raisonné, adopté seulement après avoir tenté l’ensemble des mesures préventives. Dès lors qu’une maladie s’installe malgré tout, il existe quelques solutions homologuées «jardin amateur ». Citons par exemple la bouillie bordelaise pour les maladies cryptogamiques, mais à réserver aux cas graves et en respectant scrupuleusement les doses et intervalles d’application.
Le vrai enjeu consiste à protéger la biodiversité du jardin, la faune auxiliaire et la santé des usagers. Un fongicide chimique, même homologué, doit être utilisé en dernier ressort, en prenant soin d’exclure les enfants ou les animaux lors de l’emploi, de couvrir les autres plantes et de ne jamais traiter en période de floraison, sous peine d’impacter les pollinisateurs.
Enfin, ne jamais jeter les résidus de traitement ou de fruits malades dans le compost : mieux vaut les évacuer hors du potager. Un bon respect des consignes d’étiquetage et le suivi des bulletins d’alerte phytosanitaire locaux évitent les erreurs. C’est en adoptant un rapport écoresponsable aux traitements que l’on protège, sur le long terme, la santé du sol, des fraisiers et des générations futures.
FAQ
Comment reconnaître la différence entre oïdium et botrytis sur les fraisiers ?
L’oïdium apparaît sous forme de duvet blanc farineux sur les feuilles et enroule celles-ci en fin d’attaque, tandis que le botrytis (pourriture grise) provoque un feutrage gris sur les fruits mûrs, qui brunissent et ramollissent, souvent en conditions humides.
Un paillage est-il réellement utile contre les maladies des fraisiers ?
Oui : un paillage végétal drainant protège les fruits du contact direct avec le sol humide, limite les projections de spores de champignons et maintient une température favorable à la bonne santé des plants.
Les variétés comme Albion sont-elles plus résistantes aux maladies ?
La variété Albion est en effet reconnue pour sa résistance accrue aux principales maladies fongiques du fraisier, dont le botrytis et l’oïdium. Installer des plants issus de sélection récente limite naturellement les risques d’attaque massive de champignon.
Doit-on arracher un fraisier touché par la verticilliose ?
Oui : la verticilliose (provoquée par Verticillium dahliae) n’est pas contrôlable une fois détectée. Il faut éliminer le plant atteint, éviter d’installer d’autres plantes sensibles au même endroit et respecter une rotation stricte d’au moins quatre ans.
Le bicarbonate de soude est-il efficace en préventif ?
Le bicarbonate de soude agit en surface pour limiter le développement des champignons responsables de maladies comme l’oïdium ou les taches brunes, surtout utilisé en pulvérisation dés le début de saison, associé à une bonne aération du feuillage.